J8 : Train de brousse

La Corse Puis Le Belem
16 septembre 2018

Parcours : Calvi - Ajaccio
Distance : 170 km

J’ai arrêté d’essayer d’expliquer en détail mon itinéraire aux gens que je rencontre. Poser la voiture à l’aéroport de Calvi pour ensuite marcher jusqu’à la gare pour prendre un train qui m’emmène à Ajaccio où je prends le bateau pour Antibes dépasse de loin mes capacités d’élocution.

8h01, départ de Calvi dans une rame récente assez remplie. La particularité du réseau de chemins de fer corse, hormis le fait qu’il n’est pas électrifié, c’est que l’écartement des voies est dit métrique (écartement de 1 mètre, contre 1,435 pour l’écartement dit “normal”). Depuis 2012 ce n’est d’ailleurs plus la SNCF qui en est en charge, mais les Chemins de Fer Corses (CFC). Le réseau dessert Calvi, Bastia et Ajaccio, en passant par Ponte-Leccia au centre de l’île où il me faudra changer de train.

On suit la côte jusqu’à l’Île-Rousse, puis direction plein sud dans la montagne. On est loin du cahier des charges d’une ligne de TGV, ici la voie empreinte des courbes aux rayons assez serrés et monte des pentes de plusieurs pourcents. Et cela se ressent dans le train qui remue beaucoup. Le moteur donne parfois l’impression d’être en surrégime, et en descente le frein à main semble enclenché pour ne pas nous laisser filer dans la pente avec le seul frein moteur pour nous ralentir.

Mon oncle me racontait qu’il y a quelques dizaines d’années, dans un train plus ancien, cela vibrait encore plus à en faire tomber les bagages sur la tête des passagers. Et puis aussi, autre époque, il pouvait arriver que le conducteur du train s’arrête en pleine montagne à côté de la maison d’un garde-barrière. On venait alors lui apporter un plat de pâtes qu’il mangeait tranquillement avant de repartir 10 minutes plus tard.

On n’en est plus là, mais les arrêts en pleine forêt sont toujours possibles. En effet en plus des quelques gares sur le parcours, il y a également des haltes où il n’y a guère plus qu’un quai envahi par la végétation et pas de route à proximité. Elles peuvent desservir des hameaux ou des départs de sentiers de randonnées. C’est le cas par exemple de Vizzavona qui se situe proche du GR 20 et où les personnes qui n’en font que la moitié montent pour retourner à la civilisation.

Sans plus attendre, une fois arrivé à Ajaccio, je me rends au port pour y découvrir ce qui m’a poussé jusqu’ici. Le Belem est bien là, on ne peut le rater même s’il pourrait être éclipsé par les ferrys derrière lui. Pour l’instant assailli de visiteurs qui viennent monter à bord à l’occasion des journées du patrimoine, j’attendrai le soir pour embarquer.

Ajaccio, de ce que j’ai pu en voir, me donne l’impression d’une ville plus grosse, plus ouverte et aussi plus récente que Bastia. Bastia m’a semblé plus tournée sur son vieux port puis construite autour en montant sur la colline. Pleine de petites ruelles et d’escaliers. Tandis qu’Ajaccio, ancrée dans son large golfe, est plus étendue. Les rues sont plus larges, il y a même de l’espace pour quelques hôtels particuliers. Bastia me semble plus proche de ses habitants, tandis qu’Ajaccio avec son casino et ses plages, est plus touristique.

Ajacciu Ajacciu

La veille ville à côté de la citadelle d’Ajaccio vaut le coup d’œil. Loin des grandes résidences avec vue sur la mer, le quartier regorge de petits restaurants dont les terrasses permettent de profiter de l’ombre et de la fraîcheur très végétale de ces quelques rues. Si ce n’était pour les voitures qu’on peut y croiser, on pourrait se croire dans un de ces petits villages perdus dans les collines.

Embarquement. 21h. Dans la pénombre du quai attentent silencieusement plusieurs personnes, seules ou en petits groupes. Curieux, hésitants, on s’interroge du regard, cherchant à se rassurer mutuellement. Oui, c’est maintenant. Cette aventure va prendre une tournure bien plus réelle d’un coup d’un seul. Une ombre bouge sur le bateau, premier signe de vie à bord, premier contact avec ce qui sera notre environnement pendant 4 jours. Un matelot apparaît au bout de la passerelle et, silencieusement, une file se forme pour monter à bord.

Nous sommes déjà une quarantaine de “stagiaires” (c’est le terme), les derniers nous rejoindrons demain matin juste avant de partir. Après une rapide explication sur le déroulement de la soirée et des prochains jours, un numéro de bannette nous est attribué puis nous sommes escortés jusqu’à nos cabines. Il y en a 4, compartimentées, avec des lits superposés. Il ne faut pas être trop grand ni claustrophobique, parce qu’on se retrouve à 4 dans 8 m3.

Notre bout de cabine Notre bout de cabine

Il faisait déjà chaud à l’extérieur, alors à l’intérieur c’est difficilement supportable au début, et le sac de couchage est plus un fardeau qu’autre chose. Mais il faut dormir, car il est bien précisé qu’il faut « arriver reposé ».

Photos
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