J9 : Écosse à nous deux
Où je découvre que lire Damasio ne prépare pas à tout.
Parcours : Édimbourg - Aviemore
Distance : 138 miles (222 km)
Moment important aujourd’hui puisque c’est la récupération de la voiture. Et vous n’êtes pas sans savoir qu’on roule de l’autre côté de la route ici. C’est donc non sans quelques appréhensions que je fais quelques tours à vide dans le parking avant de sortir affronter les bouchons d’Édimbourg. On a évidemment tendance à se situer trop à gauche sur la chaussée, mais dans l’ensemble ça se passe plutôt bien. Il suffit en ville de suivre les autres voitures dans les carrefours, et en cas de doute de se répéter en boucle “gauche gauche gauche” quand on est perdu. Il y a beaucoup de réflexes que quelques jours ne suffiront pas à gommer (et heureusement). On se cogne contre la porte avec le bras droit quand on tourne le volant trop amplement, on ne sait pas où regarder pour faire une marche-arrière, et parfois lorsqu’on appuie sur l’embrayage au lieu de passer les vitesses on met le clignotant pensant que le résultat sera le même. Oui, d’habitude la main gauche ne sert que pour le clignotant, alors quand le cerveau dans le contexte de la conduite se dit “activons la main gauche”, ben il fait ce qu’il sait faire avec.
On commence d’emblée avec pas mal de route. Elles sont plutôt de bonne, voire de très bonne qualité. Celle qui me conduit à Stirling puis à Perth est un mix entre une nationale et une autoroute, avec pas mal de passage en 2x2 voies mais aussi des arrêts de bus tout du long et des ronds-points par-ci par-là. Et enfin fait étonnant, elle est aussi doublée d’une piste cyclable indépendante qui la suit en décalage de quelques mètres, même en pleine campagne.
Je me retrouve rapidement dans des longues portions droites en pleine forêt et je suis donc très surpris lorsque cherchant de quoi me restaurer, je tombe sur une aire de repos sortie de nulle part. Ou une aire d’achats plutôt, car on y trouve quelques magasins de vêtements locaux mais surtout une grande épicerie fine type le Bon Marché (en rase campagne je rappelle), avec des prix en rapport à la clientèle visée. Bref, ça sent le touriste à plein nez dans le coin.
Première randonnée écossaise dans la région vallonée des Cairngorms. Il s’agit de Meall a’ Bhuachaille. En bas on me dit, dans un accent écossais campagnard, que c’est « very windy » en haut. Je me dis que bon, je connais bien le Mistral et puis j’ai lu La Horde du Contrevent, je devrais m’en sortir. Et plus ça monte, plus la végétation se fait petite et le vent plus fort.
On quitte la forêt
Dans les présentations des randonnées, il est toujours indiqué le dénivelé positif et négatif (D+/D-, ici plus de 500 mètres) pour rejoindre le sommet, mais il faudrait pouvoir trouver une notation également pour retranscrire l’effort lié au vent. Car en l’occurrence ici la pente est droite, mais avec le vent de face ou de trois-quarts face selon l’orientation du sentier il y a vraiment un mur de vent contre lequel pousser en plus de la gravité. Les dernières pentes sont les plus difficiles, le vent étant de plus en plus fort. En arrivant en haut, on est bien heureux de trouver un énorme cairn derrière lequel s’abriter. Il m’est difficile de prendre des photos dans ces conditions et rester debout sans bouger demande des efforts. Le Mistral est un petit joueur, il ne souffle que par rafale, alors qu’ici la force est vraiment constante. Quant à Damasio, il a forcément tenté cette ascension lui aussi avant de concevoir le furvent. La vue est pour le coup totalement dégagée, même s’il n’y a que peu de rayons qui filtrent à travers les épais nuages qui m’ont accompagné aujourd’hui. Ça ressemble d’ailleurs quelque peu à l’Islande, mais en plus boisé et avec des courbes moins abruptes. Il n’y a pas de très hauts sommets en Écosse, ni dans le Royaume-Uni d’ailleurs. Le plus haut est le Ben Nevis au pied duquel je passerai dans quelques jours, et qui ne fait que 1344 mètres.
Long way home
Il y a à perte de vue, de chaque côté du champ de vision, des vallons plus ou moins embrumés, quelques bouts de forêt, des lacs, quelques sentiers très bien tracés, et quand on a de la chance comme aujourd’hui, on peut ajouter à cela un voire deux arcs-en-ciel. Bref, tout ce qu’on peut s’imaginer des Highlands d’Écosse.