J7 : fuite par les marécages

La Mer Baltique Sur Le Belem
8 juillet 2019

Lieu : pointe nord de l'île de Öland

Nous retrouvons le soleil au petit matin, et avons la joie de constater que nous avons des crêpes au petit-déjeuner. Quelques stagiaires habitués ont eu l’autorisation des cuistots pour utiliser la cuisine pendant leur quart de nuit, et nous faire cette petite surprise.

Nous mouillons au large de la pointe nord de l’île de Öland (prononcer Euland). L’ancre est jetée, mais ce n’est pas elle directement qui va retenir le bateau mais le poids de la chaîne qui la relie au navire. Au contraire, il ne faut pas que l’ancre accroche quelque chose, sinon elle est bloquée et il n’est plus possible de la remonter.

Aujourd’hui nous irons à terre pour une petite randonnée improvisée sur cette île très prisée par les vacanciers suédois. Mais avant cela nous avons l’occasion de monter en haut des mâts, grand mât et mât de misaine. Tout en haut, sur la vergue du petit cacatois avec 2 autres camarades d’infortune, on ne fait pas le fier. Ce n’est pas tant par la hauteur que nous avons prise et par les 30 mètres qui nous séparent du pont que par le fait d’avoir l’impression de marcher dans le vide. En effet nos pieds ne s’appuient que sur un simple câble d’acier qui tremble à chaque mouvement des autres personnes, et que nous ne voyons pas car il est masqué par la vergue à laquelle nous nous accrochons fermement.

Après manger, le zodiac nous amène à terre. C’est impressionnant de filer à vive allure au ras de l’eau, surtout après avoir pu contempler l’horizon depuis le mât de misaine. C’est dans une ambiance de colonie de vacances que nous descendons à quai dans le petit port de Byxelkrok. Le volume sonore des latins que nous sommes dénote complètement avec l’ambiance réservée des locaux qui ne manquent pas de nous regarder en coin. D’ailleurs autre détail qui souligne la différence culturelle, chez le - très bon - glacier que nous prenons d’assaut, il ne faut pas simplement faire la queue mais aussi prendre un ticket !

À l’extérieur, la différence de température est énorme par rapport au bateau. Sur le Belem nous étions à rechercher et à nous réjouir de chaque petit rayon de soleil, mais ici à peine arrivés à terre que nous cherchons subitement l’ombre. Et pourtant il n’y a que quelques centaines de mètres et 3 minutes de zodiac qui nous séparent. Nous longeons la côte d’où se dégage un fort sentiment de douceur et de paix. Quelques affleurements rocheux en guise de plage, des espaces sauvages avec une végétation basse et fleurie. Par endroit des sternes arctiques qui reviennent à leur nid un poisson au bec. Au large, le Belem nous suit et contourne lui aussi la pointe de l’île pour nous attendre plus au nord. De l’autre côté du petit sentier que nous suivons se trouve une piste cyclable puis une route, et enfin quelques maisons. Chacune est assez semblable à sa voisine et plutôt typique de la Suède ce me semble. Plutôt petite, avec un étage. Un toit avec 2 pentes distinctes pour avoir un bel espace à l’étage. Un perron. Un jardin sans fioriture et non clôturé. Éventuellement un rosier ou un potager dans un coin. La pelouse est tondue mais on est loin du gazon anglais, on sent encore un côté sauvage s’en dégager. Un arbre fruitier. Et puis toujours un mât auquel flotte le drapeau suédois.

Nous remontons le long de cette côte, plein de la sérénité propre au lieu, pour arriver finalement au phare de Långe Erik. Avec quelques téméraires, nous poussons l’aventure plus loin en contournant la lagune qui se trouve derrière le phare. Tandis qu’on peine à trouver un chemin sec à travers les marécages, on se console en admirant cette étendue d’eau peu profonde où des centaines d’oiseaux viennent chercher à manger. Au loin nous avons toujours en ligne de mire le Belem et le phare, cachés derrière la végétation et les bandes de terre qui ferment la lagune. Dans le soleil voilé de la fin d’après-midi, cela m’apparaît soudain comme une image sortie tout droit d’un récit de Stevenson. Avec une goélette qui attend au large, ne pouvant se rapprocher plus des côtes à cause de hauts-fonds. Et une chaloupe qui est mise à la mer pour venir récupérer quelques bandits ou gentlemen ruinés en fuite sortant des marécages. Ce sera pour nous le zodiac qui nous ramènera à bord de notre trois-mâts.

Soirée spéciale ce soir au retour de la randonnée. Buffet dans le grand roof et bouteilles de vin accessible à tous. Je m’endors alors qu’au-dessus de moi résonnent encore les chants et la guitare, pour une soirée de chaleur humaine isolée sur notre îlot flottant.

Photos
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