J2 : Tall Ships' Race

La Mer Baltique Sur Le Belem
3 juillet 2019

Parcours : Hambourg - Aalborg
Distance : 545 km

Nous sommes aujourd’hui en route pour le Danemark. Par la fenêtre défile la campagne allemande, parsemée de nombreuses éoliennes. Il en pousse de partout, sans linéarité, d’une manière presque naturelle et harmonieuse avec le reste de la végétation. C’est comme une strate supplémentaire, qui s’élève au-dessus des bois et des champs. Comme une espèce d’arbre nouvelle et immense.

Le train marque l’arrêt à la frontière, le temps de faire monter quelques officiers. Chacun présente son bout de papier plastifié, et une dame blonde tirée aux quatre épingles, en uniforme, juge de qui est bon et qui ne l’est pas. De qui a le droit de passer et qui ne l’a pas. C’est un sens de l’hospitalité tout relatif, mais plutôt courant dans un monde sans voiture à compartiment. Mais finalement nous arrivons sans encombre à Aalborg (prononcer Halbô), et nous pouvons profiter du soleil de début juillet à une latitude qui le rend encore haut et chaud malgré l’heure. C’est le même soleil, le même ciel, la même nuance de bleu, les mêmes nuages blancs, la même chaleur quand le soleil est directement sur la peau. Il y a des voitures qui ressemblent beaucoup à des voitures, et des camions de pompier qui font pimpon. Après ce contrôle de la réalité effectué, il est temps d’aller profiter de la ville et de ses rues piétonnes. Mais sur les quais surprise, c’est l’effervescence d’un festival estival. Je découvre la Tall Ships’ Race version 2019. Il s’agit d’un rassemblement d’anciens navires à voiles (ou de répliques plus récentes) qui paradent et qui font des courses chaque été dans le nord de l’Europe. Il y a donc eu une étape à Aalborg cette année, cela explique la présence du Belem ici (et de ce fait, de la mienne). Il apparaît tout petit au loin, au bout du quai. Devant lui des dizaines d’autres navires, de toutes nationalités et de toutes tailles. Certains se font plus remarquer que d’autres, comme le 3 mâts polonais Dar Młodzieży qui frôle les 100 mètres de long, ou encore le Cuauhtemoc dont l’énorme pavillon mexicain flotte fièrement et colore la fête. Tous ces bateaux partiront vers la Norvège ces prochains jours où ils continueront les festivités et les courses, tandis que le Belem retrouvera sa solitude en mettant le cap à l’est vers la Suède dès demain matin.

À peine ai-je marché une centaine de mètres le long du quai, à peine ai-je aperçu quelques coques et quelques mâts, à peine ai-je deviné au loin la houle blanchie par le vent que me voilà assailli de cette émotion singulière, l’appel de la mer. C’est l’envie de voir ces proues percer les flots, bercer par la mer, de voir ces voiles larguées et gonflées par le vent qui les poussera à disparaître derrière l’horizon. C’est cette soif d’aventure mêlée en même temps à une peur indissociable. Celle de se sentir emporter par des forces qui sont plus fortes que moi. La peur de l’inconnu. La peur de disparaître de la face du monde, de se laisser aspirer par cette immensité. On oublie tout cela en vivant loin des côtes, mais c’est toujours présent à l’intérieur de nous, si prompt à rejaillir à la surface avec plus de force encore que les fois précédentes.

Nous ne sommes qu’une trentaine à embarquer ce soir. Pour la plupart des habitués. 8 jours en mer Baltique ce n’est peut-être pas le plus accessible pour une première fois. L’avantage de ne pas être complet (le maximum de stagiaires est de 48) c’est que c’est grand luxe niveau place. Nous ne sommes que 2 dans ma cabine pour 4. Je la partage avec Bernie, l’un des seuls non francophone de la bande. Avec sa barbe blanche, sa casquette et son tricot rayé il ressemble à un vieux loup de mer échappé d’une case de BD de Hergé.

Photos
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